Traditionnellement, l'absinthe se préparait en versant de l'eau fraîche sur un morceau de sucre couché sur une cuillère perforée. L'eau, s'écoulant en minces filets, dissolvait le sucre qui se diluait dans l'absinthe, adoucissant son amertume, typique des absinthes du début du siècle.
Cuillère à absinthe perforée
Coffret verres et cuillère à absinthe
Cuillère à absinthe Premium « Feuille »
Cuillère à absinthe Premium
Cuillère à absinthe Premium « Belle Époque »
Cuillère à absinthe Premium « Croix »
Les cuillères à absinthe
La tradition de la cuillère demande patience et dextérité, puisque le rituel peut durer plusieurs minutes. Aux dix-neuvième et début du vingtième siècle, ce rituel était un vrai spectacle qui permettait aux experts du genre d'attirer l'attention des badauds en mettant en scène leur dextérité.
Pourquoi sucrer l'absinthe ?
À l'époque, les absinthes étaient particulièrement amères. Mais le rituel de la cuillère présente d'autres propriétés : le sucre est un puissant exhausteur de goût, qui ne cherche pas à « masquer » l'amertume de l'absinthe, ardemment recherchée par les amateurs, mais bien à la tempérer tout en exaltant les saveurs de fond. Ainsi, délicatement filtrée par le sucre, l'eau libère lentement tous les arômes de l'absinthe.
D'où vient la cuillère à absinthe ?
Les cuillères perforées à absinthe sont apparues plutôt tardivement, forcément après 1850, lorsque le sucre, jusque là en forme de pain de sucre qui devait être ciselé, est commercialisé en morceau.
Les cuillères à absinthes seront ensuite largement popularisées vers 1890 - dans l'élan de l'Exposition Universelle de Paris en 1889 qui édite une très recherchée cuillère à absinthe en forme de Tour Eiffel -, en témoignent les nombreux dessins de presse illustrant le rituel de la cuillère dans les bistrots populaires parisiens et provinciaux.
Véritables bijoux, les cuillères étaient ciselées par des orfèvres qui créaient tous des modèles originaux, capables de les distinguer de la concurrence. On peut distinguer deux profils de cuillères d'époque :
Les cuillères non-percées (ou cuillères "Mazagran") : elles ressemblent à nos cuillères actuelles, concaves et sans trous mais avec un long manche parfois au métal travaillé. Elles servaient initialement à mélanger l'absinthe lorsqu'elle se buvait encore diluée avec du sirop, mais on pouvait également fondre le sucre et un peu d'eau dans la cuillère avant de verser son contenu dans le verre.
Les cuillères "pelles perforées" : ce sont les cuillères les plus mythiques, assidûment recherchées par les collectionneurs, et celles qui personnifient la légende de la Fée Verte. Au fil du temps, elles portèrent différentes appellations : cuillères à absinthe repercées, spatules à absinthe, cuillères à absinthe plate, ... Contrairement aux cuillères non-percées, celles-ci sont ajourées, plates et larges, en forme de « pelle ». Dans leur version la plus travaillée, elles adoptent la forme de feuille d'absinthe et se perforent de délicats cisaillements, comme « la Croix suisse » ornée de l'emblème national.
Comment utiliser la cuillère à absinthe ?
1. Déposer au fond du verre la mesure voulue d'absinthe « amère » pure (un tiers à un quart du contenant total).
2. Poser horizontalement la cuillère sur le verre.
3. Déposer un morceau de sucre sur la partie perforée de la cuillère.
4. Verser l'eau sur le sucre très lentement, au goutte à goutte pour commencer. C'est ce qu'on appelle « étonner » l'absinthe.
5. Lorsque le sucre s'est désagrégé, verser l'eau en filet fin. On dit alors qu'on « bat l'absinthe ».
6. Observer la louche qui opacifie l'absinthe au fur et à mesure de sa dilution. Attendre une minute. Déguster.
Le Musée de l'Absinthe d'Auvers sur Oise (www.musee-absinthe.com) expose un rituel de la cuillère encore plus précis, édité dans « Le Dictionnaire universel de cuisine » en 1894 :
« Goutte à goutte l'eau doit tomber sur la liqueur jusqu'à moitié du verre pour favoriser la métamorphose qui s'opère par le précipité calcaire qui la chauffe et la transforme en liquide blanchâtre. Alors seulement on mouille le sucre sur un triangle spécial et après une minute de désagrégation, un flot d'eau glacée doit la noyer en remplissant le verre. On l'agite. On la laisse reposer un instant et la fée aux yeux verts est prête à recevoir les caresses de ses adorateurs ».